Pourquoi résister ? Quelques rappels,
quelques repères pour commencer
Intervention de Claude SCHAUDER, l'un des initateurs de la coordination Appel des Appels 67. Il revient sur ce qui a suscité ce mouvement national et sur la façon dont chacun peut s'en saisir localement.
Chers Amis,
Voici à peine 5 mois, le 26.12 exactement, Roland Gori, écrivait à quelques uns de ses amis et collègues « que face au désarroi social dans les domaines du soin, de l'éducation, de la justice et de la culture et dans la suite des différentes mobilisations que ce désarroi entrainait, il convenait de nous rassembler en un "appel des appels" (pétitions) susceptible de mieux nous faire entendre et de regrouper nos forces et de faire circuler une information mal ou pas du tout relayée par une presse trop souvent aux ordres »…
D’un peu partout montaient en effet les plaintes. Les appels se multipliaient mais trop souvent mal diffusés, pas assez efficaces, loin de réunir les 200 000 signatures de la pétition « Pas de zéro de conduite pour les enfants de 3 ans » fruit d’une mobilisation trans-sectorielle. Un pareil regroupement n'avait de chance d'aboutir qu'à la condition qu'il ne soit pas dès le départ "enclavé" dans un secteur, l’affaire d’un groupe, une association ou l'un des appels. C’est ainsi que quelques dizaines de citoyens se voulant libres et éclairés, issus des différents secteurs, professions, mouvements, courants, partis, syndicats, signataires de toutes sortes d’appels et de pétitions se sont retrouvés autour de lui et de Stéphane Chedri pour lancer cet appel des appels que 76 000 personnes ont signé et qui a conduit par deux fois plus d’un millier de personnes à se réunir ces derniers mois (fin janvier puis le 22 mars chez Stephane Gatti à la Maison de l’Arbre à Montreuil), pour réfléchir et travailler à ce projet complexe, ambitieux mais oh combien indispensable.
Comme vous le savez, par cet appel, nous voulions nous professionnels du soin, de l'éducation, de la justice et de la culture, attirer l'attention des Pouvoirs Publics et de l'opinion sur les conséquences sociales désastreuses des Réformes hâtivement mises en place ces derniers temps. A l'Université, à l'École, dans les services de soins et de travail social, dans les milieux d'information et de culture, la souffrance sociale ne cesse en effet de s'accroître. Au nom d'une idéologie de "l'homme économique", le Pouvoir défait et recompose nos métiers et nos missions en exposant toujours plus les professionnels et les usagers aux lois dites "naturelles" du Marché. Cette idéologie s'est révélée catastrophique dans le milieu même des affaires dont elle est issue. Vous savez comme moi que nous n’en avons à l’heure pas encore mesuré l’ampleur.
Lors de nos différentes rencontres, en particulier celle du 22 mars, date hautement symbolique, chaque champ socioprofessionnel concerné par les appels (qui continuent de se multiplier) a porté témoignage de la manière dont ses praticiens résistent aux politiques de normalisation, de détricotage systématique des métiers dans chacun des domaines, justice, culture, recherche, information, psychiatrie, hôpital public, et plus généralement dans tous les secteurs du « bien public », garant ultime de l’espace de l’intime et du lien social. Nous avons également tenté de cerner davantage le périmètre de ses actions et de ses valeurs afin d’éviter d’entrer en concurrence avec les autres mouvements politiques et sociaux tout en soutenant leurs actions lorsqu’elles se fondent sur les mêmes valeurs. L’Appel des appels ne saurait en effet se substituer aux responsabilités spécifiques des mouvements syndicaux et politiques dont il salue la tradition et la détermination.
Notre accord porte sur le fait que nous nous voulons non seulement un véritable laboratoire d’analyses et de réflexions transversales aux champs social , scientifique et artistique MAIS AUSSI un laboratoire d’expérimentations et de soutien à la production de savoirs et d’ actions alimentant, sur la durée, chacun des appels en lutte pour la préservation et la promotion d’une éthique dont l’homme et son devenir reste la première des préoccupations.
Tout en révélant le caractère citoyen des valeurs, des savoirs et des pratiques des métiers, l'Appel des appels prétend donc œuvrer à une culture du politique sans confusion avec « la politique » afin de créer les conditions d’un dialogue avec les institutions nationale et européenne de la société civile, les partis, les organisations syndicales, les associations, les mutuelles et coopératives, un dialogue permettant dans la durée de résister à la civilisation actuelle de la norme et de la peur, et de faire des propositions à la hauteur des défis de la crise.
Parce que nous refusons qu'une telle idéologie mette maintenant et pour longtemps en "faillite" nos missions, nous avons donc décidé de continuer ce travail sous la forme d’action d’information et de soutien à des initiatives tant locales que nationales, d’où la création un peu partout sur le territoire de groupes locaux comme le nôtre.
La journée d’aujourd’hui s’inscrit dans ce projet. Elle doit nous permettre de mieux nous connaître et d’échanger sur les situations auxquelles nous sommes confrontés dans les différents champs où nous travaillons, sur les actions que nous avons entreprises. Elle doit nous permettre aussi de renforcer la petite équipe de la coordination locale que nous constituons et qui a organisé cette journée que la Librairie Kléber accueille en véritable partenaire…
C’est dans cette perspective que nous demanderons à ceux qui souhaitent s’investir dans ce projet de bien vouloir nous indiquer leurs coordonnées … Nous pourrons ainsi leur indiquer où se tiendra la prochaine réunion de travail que nous organiserons dès le 12.09 et où nous mettrons en place des groupes de soutien locaux ainsi que des groupes de travail (dont celui à qui il reviendra de gérer le blog et le système d’information et d’alerte dont nous voulons nous doter).
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