Résistances... poursuivre et organiser la mobilisation

Le 6 juin, plusieurs centaines de personnes
à la journée "Résistances" à la libraire Kleber.


Social et solidarité, santé, justice et libertés, éducation... les intervenants, professionnels de différents secteurs, ont apporté témoignages et analyses sur les effets des politiques publiques actuelles. Les textes des interventions seront publiés dans les prochains jours.

Au delà du témoignage et de l'analyse,
la question est celle des résistances...
Les mobilisations collectives doivent s'élaborer


Ce sera l'objet de la prochaine rencontre.

D'ici là, chacun peut poser les jalons d'une convergence des actions. Le groupe de discussion permet à chacun :
- de communiquer son adresse mail,
- de prendre contact pour faire publier sur ce blog un article d'analyse,
- de prendre contact pour signaler une situation locale qui nécessite une mobilisation,
- d'organiser des groupes de travail sur des thèmes particuliers,
- ...

Date de la prochaine rencontre :
le 12 septembre 2009 (lieu et horaires à préciser)
SOYONS NOMBREUX, SOYONS ACTIFS,
C'EST IMPORTANT

à Joachim Gatti

"Face à une dictature, comment agir politiquement quand on est un créateur ?"

Marie-José Mondzain posait cette question au printemps 2009 dans un entretien accordé à la revue Cassandre [1]. Les sbires de la "démocratie Potemkine" [2] qui nous régit ont montré de quelle façon ils voulaient accueillir la réponse.
Ce mercredi 8 juillet 2009, Joachim Gatti a été touché au visage d'un tir de flashball qui lui a fait perdre son oeil droit. Que faisait-il donc qui puisse déclencher cette atrocité ? Joachim témoignait pacifiquement son soutien aux expulsés de "la Clinique". "La clinique, en référence aux expériences venues d’Italie, avait pris la forme d’un "centro sociale" à la française :
logements, projections de films, journal, défenses des sans papiers, repas… Tous ceux qui réfléchissent au vivre ensemble regardaient cette expérience avec tendresse." (Sur Joachim Gatti, lettre ouverte de Stéphane Gatti son père)
Une manifestation de solidarité s'est déroulée hier pacifiquement à Montreuil jusqu'à ce que les forces de police ne décident de charger un cortège dont, "Dans un souci d'apaisement, les organisateurs (...) ont cherché à modifier le parcours pour éviter que le face à face ne se prolonge, repartant vers la Croix de Chavaux", ainsi que le souligne le communiqué de ce jour de l'AFP, repris par les éditions en ligne de journaux tels que Le Monde et Le Figaro. Les gardes mobiles se sont alors acharnés avec une violence qui a choqué la population de Montreuil sur des manifestants qui s'étaient contentés de porter des banderoles en évitant toute action agressive.
Le 22 mars 2009, Stéphane Gatti accueillait la deuxième journée nationale de l'Appel des appels dans les locaux de La Parole errante à la Maison de l'Arbre, à Montreuil. Nous nous y rencontrions "décidés à combattre une idéologie de la norme et de la performance qui exige notre soumission et augure d’une civilisation inique et destructrice de l’humain" [3].
Aussi, les participant-e-s au comité de Paris de l'Appel des appels tiennent à témoigner à Joachim et Stéphane Gatti, leur émotion, leur sympathie tout autant que leur détermination à lutter contre cette barbarie qui vient et qui a déjà meurtri bien trop d'entre nous.
Il nous appartient, toutes et tous, d'élaborer les cadres dans lequels pourront prendre forme les résistances et ripostes qui mettront en échec ceux qui déclament sur les écrans du Spectacle : "Nous devons protéger nos concitoyens les plus fragiles, ceux qui souffrent le plus", "L’exclusion, c’est ce que la crise peut engendrer de plus grave" [4] et qui, dans le même temps, assument le bon fonctionnement d'un Etat qui peut mettre en garde à vue simultanément 74 syndicalistes d'une même entreprise (EDF-GDF) et qui réserve aux plus démunis et aux plus précaires l'assurance d'une constante brutalité répressive.
L'Appel des appels nous donne un de ces cadres où nous pouvons nous retrouver, un lieu où nous pouvons construire la confiance face à la déshumanisation.


Ce mardi 14 juillet 2009
Comité de Paris de l'Appel des appels

... Pétition Interdiction totale de l'utilisation des armes non-létales (flashball, LBD40, tazer) par les forces de l'ordre



[1] Cassandre Horschamp, no 77, p. 49
[2] Villages Potemkine, luxueuses façades érigées à la demande du ministre russe Potemkine destinées à masquer la pauvreté des villages lors de la visite de l'impératrice Catherine II en Crimée en 1787.
[3] Charte de l'Appel des appels
[4] Discours présidentiel devant le Parlement réuni en Congrès

Lettre adressée aux professeurs des écoles injustement sanctionnés

Chers Professeurs des écoles,

Il est inacceptable que vous soyez punis par le Ministre et la hiérarchie de l’Education Nationale alors que, par votre décision intelligente et responsable, vous n’avez pas voulu être complice de la nouvelle forme de maltraitance constituée par le temps de soutien après la classe, dit aide personnalisée, qui doit être consacré obligatoirement aux apprentissages dits fondamentaux (français, calcul, mathématique).
Mieux que quiconque, vous savez en effet que, à la fin du temps scolaire, les enfants en difficulté sont épuisés, enfermés dans leurs peurs, échecs, blocages et inhibitions, dans leur anxiété, leurs angoisses ... surtout lorsqu’ils se projettent dans le retour à la maison alors que leur milieu familial est en souffrance. Beaucoup le sont déjà au début de l’après-midi ou même, pour les plus fragiles, vulnérables et démunis, dès la fin de la matinée comme le montre l’observation des enfants accueillis dans les écoles de ZEP. Seuls les enfants qui vivent au quotidien dans la sécurité affective, sans déficits de sommeil et sans comportements “perturbés” et/ou “perturbateurs”, peuvent être suffisamment vigilants, attentifs, réceptifs et disponibles au cours de l’après-midi pour capter et traiter les messages du maître, et ainsi se réaliser pleinement comme élèves. Et encore, pas tous les jours selon les fluctuations de leurs équilibres physiologiques, émotionnels, affectifs, sociaux et cognitifs. Tous ont envie de changer de « planète » à 16h.30. La très grande majorité des enseignants … également.
Votre refus d’enfermer après la classe les élèves en difficulté dans des situations d’apprentissage formel qui vont aggraver leurs difficultés, est une prise de responsabilité humaniste et civique qui vous honore. Elle montre la voie pour que les enfants en difficulté ne soient pas encore plus épuisés, démotivés ... et finalement, au fil des jours, psychologiquement et intellectuellement détruits par la journée la plus longue du monde (six heures de temps contraint).
« L’addition » quotidienne de l’aide personnalisée aux enfants en difficulté scolaire augmente encore la durée de la journée scolaire la plus longue du monde … en particulier pour ceux qui peinent à mobiliser leurs ressources intellectuelles afin de comprendre et d’apprendre, et aussi pour les enseignants eux-mêmes. Comment peut-on penser qu’une aide après la classe, fût-elle personnalisée, puisse être utile ou efficace pour les élèves dont la fatigue, le manque de vigilance et d’attention, et l’absence de motivation sont évidents à 16h.00, souvent dès le début de l’après-midi ou même à la fin de la matinée (c’est évident dans les écoles des ZEP) quand ils sont « installés » dans l’échec scolaire ?
Les dégâts viennent s’ajouter aux dégâts générés par l’accroissement de la pression intellectuelle et relationnelle avec le poids augmenté au quotidien de la fréquence et de la durée des apprentissages dits fondamentaux, dans le cadre combiné d’une semaine ramené arbitrairement à quatre jours (il faut faire en quatre jours ce qui était fait en quatre jours et demi) et de nouveaux programmes imbéciles. Il n’y a plus de temps de décompression et de respiration au cours de la journée alors qu’il est indispensable pour que tous les enfants, surtout ceux qui sont en difficulté, puissent récupérer au moins un peu de leurs fatigues psychologiques et intellectuelles, et restaurer peu ou prou leurs capacités d’attention, de concentration intellectuelle et de traitement de l’information. Il n’y a plus assez de temps pour que les enfants puissent libérer leurs émotions, leurs sensibilités, capacités et intelligences cachées, ainsi que la richesse de leur imaginaire, pourtant évidentes lorsqu’il s’engagent dans les arts plastiques, le chant choral, la narration, la découverte de la nature, les particularités de la vie végétale et animale, l’histoire captivante de nos ancêtres et du monde, les modes de vie dans les différentes cultures humaines ... Les enfants apprennent aussi bien le français, ou mieux, au cours de ces temps de diversification et de découverte que dans les situations d’apprentissage formel et explicite de la langue. Bien évidemment, les enseignants le savent. Les Professeurs des écoles ont donc raison de proposer l’un ou l’autre de ces champs de découverte et de plaisir au cours de la demi-heure d’aide personnalisée, alors que leurs élèves sont “intellectuellement plus que saturés”.
Les Scandinaves sont horrifiés.
En imposant sans concertation la semaine de quatre jours, l’augmentation délirante du poids des “fondamentaux” et le soutien accordé après la classe aux enfants en difficulté, le Ministre et la hiérarchie de l’Education Nationale déshumanisent l’école, accroissent les inégalités et injustices sociales, en conduisant un nombre croissant d’enfants à s’enkyster dans “le désamour” pour l’école et son rejet, et ainsi plus ou moins progressivement dans la marginalité sociale. Ce “système” aberrant et “concentrationnaire” stigmatise les familles qui cumulent les difficultés personnelles, morales, familiales, sociales et culturelles. C’est une honte pour notre pays ... en principe l’un des berceaux des Droits de l’Homme. Les étrangers que je rencontre ne comprennent pas ce “système”. On n’aurait pas agi autrement si on avait voulu pérenniser une école à plusieurs vitesses dans laquelle les plus fragiles, vulnérables et démunis ne peuvent même pas passer la première vitesse, et s’engager avec confiance dans le désir de comprendre et d’apprendre faute de pouvoir enclencher les vitesses supérieures qui permettent d’accéder aux différents niveaux des savoirs et des connaissances.
Aucun pays au monde n’a institué une journée scolaire aussi pénalisante pour les enfants en difficulté dans le cadre d’une semaine qui n’en est pas une : deux jours scolaires (lundi et mardi), un jour non scolaire (mercredi : peut-on encore le justifier par la catéchèse, prévue le jeudi il y a trente ans ?), deux jours scolaires (jeudi et vendredi), et deux jours de week-end. Dans ce cadre, tout le monde sait que le lundi est un jour très perturbé et perturbant (beaucoup d’enfants sont somnolents, en tout cas non vigilants et/ou agités). Quelle illusion et/ou quel manque d’honnêteté de penser qu’une demi-heure supplémentaire d’aide personnalisée après la classe, notamment le lundi, puisse faciliter la maîtrise du français, du calcul et des mathématiques en situation d’apprentissage formel. Tous les enseignants savent que c’est une mission impossible.
Le tribunal incontournable de Histoire retiendra que l’actuel Ministre de l’Education Nationale, ses conseillers patachons et idéologues, et sa hiérarchie vassalisée ont institué un système de maltraitance, de stigmatisation, de culpabilité et d’exclusion implicite qui déshonore notre pays et notre nation.
Il n’y a jamais eu autant d’Inspecteurs d’Académie révoqués qu’en 2008-2009 alors que leur “’faute” a été d’entendre et d’essayer de comprendre la décision et le désarroi des enseignants, notamment ceux que l’on dit « désobéisseurs ». Les informations qui “remontent du terrain” montrent toutes qu’il n’y a jamais eu autant d’enfants épuisés et déboussolés, et aussi d’enseignants exténués, stressés, démoralisés et culpabilisés par les échecs persistants des élèves les plus fragiles, vulnérables et démunis. Les lettres qu’ils adressent à leurs édiles, souvent le ou la maire, sont pathétiques et souvent bouleversantes. La porte est béante pour la consommation accrue de somnifères, calmants, psychotropes ... des enfants, de leurs parents inquiets ou désespérés et de leurs maîtres ... qui perdent confiance dans leurs ompétences. Faut-il préciser que les Français sont déjà les plus grands consommateurs de ces molécules !
Par leur refus, les « désobéisseurs » sauvegardent la dignité de l’école. Merci.
Le présent courriel peut être diffusé sans retenue.
Avec toute ma solidarité

Le 5 mai 2009
Hubert Montagner

Professeur des Universités en retraite
Ancien Directeur de Recherche à l’INSERM
Ancien Directeur de l’Unité de recherche « Enfance Inadaptée de l’INSERM

Maintenir la pression
pour obtenir des résultats

Après le 29 janvier, le 19 mars, le 1er mai, 8 syndicats appellent à continuer la mobilisation : CFDT, CFTC, CGC, CGT, FO, FSU, Solidaires, UNSA

Grande manifestation nationale
"Maintenir la pression pour obtenir des résultats :
Le gouvernement doit mettre le social
au centre de sa politique économique"
SAMEDI 13 JUIN
Départ à 14h30 de la place de la Bourse

Journée Résistances

Mais qu'est-ce qui ne va pas dans les secteurs du soin et de la santé, de l’éducation, du social et de la solidarité, des libertés publiques et de la justice, de l’information et de la culture ?

Pour répondre à ces questions, informer ceux qui savent pas encore, réunir ceux qui ne veulent pas rester passifs et tout accepter sans réagir mais aussi réflechir ensemble aux modalités d'actions envisageables, la coordination locale de l'Appel des Appels, organise le

samedi 6 juin 2009 de 9h45 à 17h
une Journée "RESISTANCES"

à la Salle Blanche de la Librairie Kléber
à Strasbourg


Relayant ainsi l'Appel lancés fin 2008 par une équipe de professionnels du soin, du travail social, de la justice, de l’éducation, de la recherche, de l’information, de la culture et de tous les secteurs dédiés au bien public, constituée en collectif national pour résister à la destruction volontaire et systématique de tout ce qui tisse le lien social , la coordination locale de l'Appel des appels donnera ce jour là la parole à des représentants locaux de ces secteurs en souffrance.
Les intervenants, eux-mêmes signataires d'une ou de plusieurs de ces pétitions qui circulent depuis plusieurs mois et qui disent la colère ou la révolte de tant de nos concitoyens, témoigneront de ce qui se passe dans notre région. Ces prises de paroles alterneront avec des exposés proposant des analyses et des commentaires de la situation ainsi que des exemples d'actions de résistances mises en œuvre ou pouvant être envisagées localement.
L'inscription est gratuite mais vu le nombre de mécontents soucieux de le dire et de s'organiser pour résister, il vaut mieux s'inscrire (nom et adresse mail) sur appeldesappels67@hotmail.fr

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PROGRAMME DE LA JOURNEE

09h15 Accueil
09h45 Pourquoi résister ? Quelques rappels…

Claude Schauder (Appel des Appels, etc.)
10h00 A quoi résister ? La novlangue
Roland PfefferKorn (Appel des Appels, etc.)
10h15 Résistances dans le social
Table ronde coordonnée par 789 Alsace,
avec Robert Volgringer (directeur de service éducatif),
Rudi Wagner (directeur de service de prévention spécialisée),
Bertrand Piret (La nuit sécuritaire), Monique Maitte (Collectif SDF Alsace),
Nathalie Gillmann (assistante sociale) et Christine Nicoulaud (éducatrice spécialisée)
11h00 Résistances dans la santé
Table ronde coordonnée par Vincent Berthou et Claude Schauder,
avec Catherine Jung (Migrations Santé Alsace),
Isabelle Galland (Association des Psychologues freudiens),
Marie Algrain (témoignages d'orthophonistes) et un médecin des hôpitaux
12h00 Débats
12h30 Pause repas

13h30 A quoi résister ? Chiffrage et évaluation
Serge Lesourd (Appel des Appels, etc.)
13h50 Résistances dans la justice pour les libertés
Table ronde coordonnée par Josiane Bigot
(Syndicat de la magistrature, Appel des appels, etc.)
et François Giordani (Syndicat de la magistrature, Appel des appels, etc.),
avec un représentant du Syndicat des Avocats de France,
de la Ligue des droits de l’Homme, de Pas de zéro de conduite et de RESF
14h35 Résistances dans l’éducation
Table ronde coordonnée par Serge Lesourd,
avec un représentant de l’Appel de Strasbourg,
Gaby Keiser-Weber (Sauvons les Rased),
un étudiant en lutte et un représentant de Sauvons l’école
15h20 Résistances dans la culture et l’information
Table ronde coordonnée par Richard Sancho
16h00 Comment continuer?
Discussion générale sur les formes possibles de résistances,
de circulation des informations et de coordination des actions
17h00 Fin de la journée

Pourquoi résister ? Quelques rappels,
quelques repères pour commencer

Intervention de Claude SCHAUDER, l'un des initateurs de la coordination Appel des Appels 67. Il revient sur ce qui a suscité ce mouvement national et sur la façon dont chacun peut s'en saisir localement.


Chers Amis,

Voici à peine 5 mois, le 26.12 exactement, Roland Gori, écrivait à quelques uns de ses amis et collègues « que face au désarroi social dans les domaines du soin, de l'éducation, de la justice et de la culture et dans la suite des différentes mobilisations que ce désarroi entrainait, il convenait de nous rassembler en un "appel des appels" (pétitions) susceptible de mieux nous faire entendre et de regrouper nos forces et de faire circuler une information mal ou pas du tout relayée par une presse trop souvent aux ordres »…

D’un peu partout montaient en effet les plaintes. Les appels se multipliaient mais trop souvent mal diffusés, pas assez efficaces, loin de réunir les 200 000 signatures de la pétition « Pas de zéro de conduite pour les enfants de 3 ans » fruit d’une mobilisation trans-sectorielle. Un pareil regroupement n'avait de chance d'aboutir qu'à la condition qu'il ne soit pas dès le départ "enclavé" dans un secteur, l’affaire d’un groupe, une association ou l'un des appels. C’est ainsi que quelques dizaines de citoyens se voulant libres et éclairés, issus des différents secteurs, professions, mouvements, courants, partis, syndicats, signataires de toutes sortes d’appels et de pétitions se sont retrouvés autour de lui et de Stéphane Chedri pour lancer cet appel des appels que 76 000 personnes ont signé et qui a conduit par deux fois plus d’un millier de personnes à se réunir ces derniers mois (fin janvier puis le 22 mars chez Stephane Gatti à la Maison de l’Arbre à Montreuil), pour réfléchir et travailler à ce projet complexe, ambitieux mais oh combien indispensable.

Comme vous le savez, par cet appel, nous voulions nous professionnels du soin, de l'éducation, de la justice et de la culture, attirer l'attention des Pouvoirs Publics et de l'opinion sur les conséquences sociales désastreuses des Réformes hâtivement mises en place ces derniers temps. A l'Université, à l'École, dans les services de soins et de travail social, dans les milieux d'information et de culture, la souffrance sociale ne cesse en effet de s'accroître. Au nom d'une idéologie de "l'homme économique", le Pouvoir défait et recompose nos métiers et nos missions en exposant toujours plus les professionnels et les usagers aux lois dites "naturelles" du Marché. Cette idéologie s'est révélée catastrophique dans le milieu même des affaires dont elle est issue. Vous savez comme moi que nous n’en avons à l’heure pas encore mesuré l’ampleur.

Lors de nos différentes rencontres, en particulier celle du 22 mars, date hautement symbolique, chaque champ socioprofessionnel concerné par les appels (qui continuent de se multiplier) a porté témoignage de la manière dont ses praticiens résistent aux politiques de normalisation, de détricotage systématique des métiers dans chacun des domaines, justice, culture, recherche, information, psychiatrie, hôpital public, et plus généralement dans tous les secteurs du « bien public », garant ultime de l’espace de l’intime et du lien social. Nous avons également tenté de cerner davantage le périmètre de ses actions et de ses valeurs afin d’éviter d’entrer en concurrence avec les autres mouvements politiques et sociaux tout en soutenant leurs actions lorsqu’elles se fondent sur les mêmes valeurs. L’Appel des appels ne saurait en effet se substituer aux responsabilités spécifiques des mouvements syndicaux et politiques dont il salue la tradition et la détermination.

Notre accord porte sur le fait que nous nous voulons non seulement un véritable laboratoire d’analyses et de réflexions transversales aux champs social , scientifique et artistique MAIS AUSSI un laboratoire d’expérimentations et de soutien à la production de savoirs et d’ actions alimentant, sur la durée, chacun des appels en lutte pour la préservation et la promotion d’une éthique dont l’homme et son devenir reste la première des préoccupations.

Tout en révélant le caractère citoyen des valeurs, des savoirs et des pratiques des métiers, l'Appel des appels prétend donc œuvrer à une culture du politique sans confusion avec « la politique » afin de créer les conditions d’un dialogue avec les institutions nationale et européenne de la société civile, les partis, les organisations syndicales, les associations, les mutuelles et coopératives, un dialogue permettant dans la durée de résister à la civilisation actuelle de la norme et de la peur, et de faire des propositions à la hauteur des défis de la crise.
Parce que nous refusons qu'une telle idéologie mette maintenant et pour longtemps en "faillite" nos missions, nous avons donc décidé de continuer ce travail sous la forme d’action d’information et de soutien à des initiatives tant locales que nationales, d’où la création un peu partout sur le territoire de groupes locaux comme le nôtre.

La journée d’aujourd’hui s’inscrit dans ce projet. Elle doit nous permettre de mieux nous connaître et d’échanger sur les situations auxquelles nous sommes confrontés dans les différents champs où nous travaillons, sur les actions que nous avons entreprises. Elle doit nous permettre aussi de renforcer la petite équipe de la coordination locale que nous constituons et qui a organisé cette journée que la Librairie Kléber accueille en véritable partenaire…

C’est dans cette perspective que nous demanderons à ceux qui souhaitent s’investir dans ce projet de bien vouloir nous indiquer leurs coordonnées … Nous pourrons ainsi leur indiquer où se tiendra la prochaine réunion de travail que nous organiserons dès le 12.09 et où nous mettrons en place des groupes de soutien locaux ainsi que des groupes de travail (dont celui à qui il reviendra de gérer le blog et le système d’information et d’alerte dont nous voulons nous doter).

Vers un démantèlement de l'action sociale ?

Le Collectif 789-Alsace, réunissant des travailleurs sociaux depuis 2004 et rattaché au Réseau 789, coordonne la table ronde sur le Social.

Travailleurs sociaux et Sans-abri
Entre répression et assistanat

Le collectif SDF Alsace a été invité par le Collectif 789-Alsace (travailleurs sociaux) à la journée "Résistances" de l'Appel des Appels, sur le thème : quel travail social pour les personnes sans-abri ?
Monique Maitte, porte parole du Collectif SDF, a réuni une dizaine de personnes pour répondre à cette question.
Son intervention reprenait les paroles qu'elle a recueillies : un regard sur le travail social, sur ce qui soutient ou non des personnes fragilisées dans leur cheminement. Elle a également adressé des alertes sur ce qui se joue localement à l'heure actuelle.

Psychologues et Evaluation :
Face au tout chiffrage et au tout économique

Isabelle GALLAND, travaillant à l’hôpital comme psychologue clinicienne. J’interviens aujourd’hui en tant que membre des « Psychologues Freudiens », une association qui s’est constituée en 2004 pour la défense et la promotion d’une pratique de psychologue orientée par la psychanalyse et dont les principes sont les suivants :

1) Le droit de la personne souffrante à choisir son psy
2) Le devoir des psys de se porter garants devant le public, à travers leurs associations et écoles, de la qualité de la formation clinique, de la pratique thérapeutique, et de l’éthique professionnelle de leurs membres.



L'amendement Accoyer

L’association des psychologues freudiens a rejoint la Coordination Psy qui elle a vu le jour en novembre 2003 en réaction à l’amendement Accoyer, voté à l’assemblée nationale pour légiférer le statut de psychothérapeute et ainsi le réserver aux seuls médecins et psychologues, ceux qui pouvaient prétendre à une formation universitaire. Nous aurions pu être satisfaits, nous les psychologues, mais nous savons que jamais aucun diplôme universitaire n’a donné le titre de psychothérapeute. La formation de psychothérapeute ne peut passer que par un travail psychothérapeutique engagé par soi-même et c’est une formation qui dure bien plus que 5 années universitaires.

Cette coordination, sous l’égide de Jacques Alain Miller, a crée les forums qui se sont réunis plusieurs fois à Paris et dans de nombreuses villes de provinces. Cela a eu pour conséquence que le rapport de l’Inserm, texte de référence pour l’amendement Accoyer, a été retiré du site du ministère de la santé par Philippe Douste Blazy, ministre de la santé à l’époque, et présent à l’un de ces forums.

Nous avions gagné une bataille, le décret d’application de cette loi semblait enterré. Mais depuis, de nombreux rapports poursuivent cette idéologie et au printemps de cette année, Monsieur Edouard Couty (qui avait déjà participé à l ‘amendement Accoyer) a envoyé un ultime rapport au ministre de la santé Roseline Bachelot. Il s’intitule : « Missions et organisation de la santé mentale et de la psychiatrie ». Que dit ce rapport ?

Il fait 50 pages, je vais tâcher de vous le résumer. Pour cela je me suis servie du très bon article de mon collègue Michel Normand, membre des Psychologues Freudiens, en contribution au débat sur le rapport Couty. [1]

Le rapport Couty

Ce rapport concerne le champ médico-social et le champ social mais aussi l’éducation, le travail, l’emploi ainsi que la justice (ce qui nous rassemble tous aujourd’hui). Le modèle médical devient la seule référence valable : les maladies mentales sont à traiter sur le même mode que les maladies somatiques, la santé mentale devient une « politique de santé publique ». Elle implique une organisation qui doit permettre la prévention, « le repérage des troubles » à tous les âges de la vie ainsi qu’un système de « surveillance », de veille et d’alerte, dans ce domaine, avec un objectif particulier : celui des modalités à envisager pour appliquer « l’obligation de soins »

Voilà le contexte général de ce rapport. Il propose « une réorganisation du cadre institutionnel de la santé mentale ainsi qu’une refonte des formations et des missions de ses acteurs ».
C’est un projet qui s’inscrit dans une logique autoritaire, destinée à garantir la sécurité sanitaire : prévention, repérage et diagnostic précoce. Sous l’idéologie du management, les métiers sont révisés et deviennent des « compétences », réduites à des « tâches », morcelées en actes transférables, protocolisables et évaluables. Le sujet, quant à lui, devient un individu à éduquer, surveiller et soigner fut ce sous la contrainte.

Dans la « Fiche métier des psychologues » toute référence à la psychanalyse est ignorée. Le signifiant « psychothérapie » à été remplacé par « soins spécifiques ». Les psychologues deviennent des « auxiliaires médicaux », intégrés dans les protocoles, les contrôles et les évaluations des chaines de soins.

Je m’arrête là pour le rapport Couty.

Le psychologue qui se réfère à la psychanalyse ne peut pas adhérer à un tel projet

Freud trouve le fondement de la psychanalyse dans la rencontre et l’écoute de son patient. Il opère à partir d’une demande qui ne peut être que particulière.

Face aux statistiques valables pour un grand nombre, le psychanalyste propose un lieu pour accueillir la parole d’un patient dans sa singularité. Face aux réponses toutes faites, le psychologue freudien n’a pas de recette, il ne sait pas ce qui est bon pour le sujet. Il sait seulement ce que Freud a découvert, et que Lacan a soutenu ensuite, que sous la plainte du patient il y a un symptôme (et non un trouble comme le DSM l’étiquette aujourd’hui). Pour Freud le symptôme est à la fois une défense du sujet dont il souffre et dont il aimerait se débarrasser mais en même temps quelque chose auquel il tient parce qu’il le protège. Pour Lacan, ce sera la part la plus particulière, la plus spécifique de l’humain, ce qui fait sa caractéristique la plus intime.

Il ne s’agit donc pas de l 'éliminer, ce symptôme, de le gommer, le boucher ou de le faire taire mais de le prendre en compte comme signe du sujet, avec sa dimension de vérité.
Le psychologue freudien sait que ce qui marche pour un sujet ne marche pas pour un autre sujet, il a à faire avec la pulsion, avec l’impossible à dire, avec le réel et ce dont il s’agit c’est de soutenir le sujet à trouver sa propre réponse, à savoir y faire avec ce réel.

La psychanalyse « parie sur les ressources de la parole en tant qu’elle humanise sans unanimiser », je cite Nathalie Georges, vice-présidente des psychologues freudiens. « Notre clinique demande du calme, des lieux protégés, beaucoup moins d’argent que bien des nouvelles techniques et une formation digne de ce nom que nous défendons et défendrons »
« Le psychothérapeute doit rester le signifiant d’une demande émanant de celui qui souffre, il est question de la responsabilité du sujet et de la part qu’il peut consentir à prendre dans les désordres dont il se plaint. »[2]

C’est pourquoi les psychologues des Hôpitaux Universitaires de Strasbourg s’associent à cette journée de l’Appel des appels.

C’est dans notre pratique quotidienne que nous rencontrons les réformes de l’évaluation, du tout chiffrage et du tout économique

2 Exemples :

- Un premier exemple concerne la réunion de dossier ou staff du service dans lequel je travaille depuis 20 ans et qui a lieu tous les jours entre médecins, infirmières, techniciennes d’études cliniques, psychologues et assistantes sociales. On discute du patient, autour du dossier du patient, pour une meilleure compréhension de la spécificité de tel patient ou des difficultés de tel autre. Depuis quelques temps on peut observer un changement dans ces réunions. On a dit aux médecins que notre service était déficitaire, que notre activité n’était pas rentable pour la sécurité sociale. Ces médecins sont désireux de continuer à pouvoir offrir une prise en charge optimum aux patients, pour cela il faut que nous puissions poursuivre notre activité. Les réunions de dossiers sont devenues alors le lieu où l’on évalue la consultation, pour la chiffrer en actes qui permettront une rentabilité. Cette réunion de dossiers ne permet plus la place d’un échange autour du patient. La prise en charge pluridisciplinaire est mise à mal. Le but est dévié : d’une mise en commun de la réflexion de chaque professionnel, on est passé à l’évaluation quantitative d’une consultation. Qui en bénéficie ? Certainement pas le patient, mais pas non plus l’équipe médicale qui est insécurisée et culpabilisée dans sa prise en soins.

- Un autre exemple que je voudrais partager avec vous est la multiplication des études, enquêtes, questionnaires et statistiques, qui ont pour but de trouver des réponses qui conviendraient pour tous. J’ai accepté de participer à la dernière enquête du service, à condition qu’il y ait en fin de questionnaire une proposition de rencontrer la psychologue pour ceux qui souhaitaient rajouter leurs énonciations personnelles aux questions qui leur étaient proposées. Il y avait aussi une place, à la fin du questionnaire, pour un commentaire libre. J’ai recueilli ces commentaires libres qui sont, en fait, des paroles de patients et les ai transmis au médecin qui dépouillait l’enquête. A sa grande surprise, ces paroles lui ont permis de comprendre la problématique des patients bien mieux que tous les items cochés en oui ou non. On nous fait croire qu’une réponse statistique va montrer un certain aspect de vérité de la problématique exposée, or rien n’est plus enseignant qu’une parole de sujet.

Que faisons-nous, les psychologues qui se référent à la psychanalyse aux HUS, pour résister à ce raz de marée du tout économique, tout rentable ?

Nous nous sommes constitués en collège, depuis bientôt 15 ans, pour unir nos forces, partager nos idées et nos inventions de résistance à la paramédicalisation par exemple. C’est un groupe sans hiérarchie, avec un président élu pour 3 ans, actif pour le bon fonctionnement du collège. Nous avons des rencontres régulières avec la DRH pour souligner et comprendre nos spécificités et en particulier notre autonomie professionnelle. Nous avons été convoqués pour la « certification » des HUS. Cela a été l’occasion d’exposer nos statuts particuliers à une directrice de soins et un directeur de la qualité qui semblaient ne pas bien les connaître.
Nous sommes néanmoins très inquiets de l’avenir qui se profile et des réponses proposées aux malaises dans la civilisation.

« On ne peut se défendre de l’impression que les hommes se trompent généralement dans leurs évaluations »

...Telle est la première phrase de l'ouvrage de Freud[3] écrit en 1929 et encore tellement d’actualité. On pourrait penser que c’est une réponse faite à M. Couty. Cela a pourtant été écrit il y a 80 ans.

« Le malaise dans la civilisation », Freud en avait déjà entrevu les causes qui sont toujours les mêmes aujourd’hui. Je le cite page 101 : « Une lutte entre deux tendances opposées, celle « égoïste » de l’homme qui aspire au bonheur face à celle qu’on pourrait appeler civilisatrice et qui se contente en règle générale d’un rôle « restrictif ». Freud avait déjà compris, au siècle dernier, qu’il ne sert à rien de punir, réprimer ou empêcher la pulsion, parce que ces pratiques ne font que la renforcer. A nous de lire ou de relire son enseignement pour faire une place aux inventions de chacun.


[1] http://www.psychologuesfreudiens.org/article.php3?id_article=846&var_recherche=normand

[2] http://www.psychologuesfreudiens.org/article_travaux.php3?id_article=852

[3] Sigmund Freud – Le malaise dans la culture – Ed. PUF - 1929

"Bonnes pratiques" pour les orthophonistes ?

Nous, orthophonistes qui avons répondu à l'Appel des Appels, constatons que notre pratique, comme beaucoup d'autres, n'échappe pas à la mesure, au contrôle et à la standardisation.




Contrat de bonnes pratiques et formations conventionnelles : orientations de notre pratique ?

S'il semble légitime que l'état, les caisses, cherchent à évaluer les pratiques de soins qu'elles financent, il est important que ces évaluations ne dénaturent pas la spécificité clinique de ces pratiques.

Par exemple, depuis 2003, les CPAM proposent aux orthophonistes en libéral un contrat de BONNES pratiques.
Est-ce là sous entendre, que ceux qui ne le signeraient pas auraient de MAUVAISES pratiques..?!!

En réalité ce contrat, moyennant un « bonus de 600 euros », nous engage à envoyer pour contrôle, 10 compte-rendu de bilan qui doivent respecter une structure rédactionnelle déterminée.

Il nous engage aussi, à suivre des formations conventionnelles rémunérées;
formations qui sont en référence quasi-exclusive aux neurosciences et gratifiées de la mallette du bilan préconisée par cette formation.

Alors que nous exerçons déjà tous sous la même convention, pourquoi veut-on nous faire signer un contrat supplémentaire?... si ce n'est pour nous orienter vers une pratique formatée, modélisée...

Le langage se construit dans une relation à un autre, à son environnement, il nous est difficile de réduire les difficultés rencontrées par un patient à une causalité unique qui serait neurophysiologique.

Peu à peu le langage est réduit, limité à une norme linguistique dont la production serait sous tendue uniquement par des capacités cognitives.
Capacités à entrainer, à améliorer, à rendre plus performantes.

Le sujet dans son histoire est évacué.


Codification des actes et référentiel par pathologie : risques à venir


Progressivement, notre pratique évolue vers une évaluation experte, pour étiqueter, classer :

Dys...
Dyslexie
Dysgraphie
Dyspraxie
Dysphasie
Dyscalculie
...Ces termes aujourd’hui ô combien banalisés, sont diagnostiqués, érigés parfois comme des labels, des AOC !

Comme pour d’autres professions, ces évaluations vont de pair avec une cotation de plus en plus fine, directement liée à l’élargissement des classifications médicales des troubles.

Ces subdivisions de la nomenclature tiennent comptent à la fois :
- de l’âge du patient,
- de la nature du trouble,
- et de l’origine supposée du trouble.
Elles sont telles que l’on finit par s’y perdre.

Notre écoute, notre attention et tout ce que nous déployons prend en compte la complexité du vécu d’un enfant, d’un adolescent, ou d’un adulte.
Nos actes relèvent pourtant de cotations différentes donc d'honoraires différents.
Comme si nous étions graduellement impliqués en fonction des troubles du patient.

Ces subdivisions risquent de nous conduire à un morcellement dans la pratique.
Que restera-t-il alors de notre approche clinique ?

A partir de conceptions humanistes, notre approche se veut plus transversale et ne s’arrête pas aux frontières de la description de chacun des troubles.
C’est au sujet que nous nous intéressons dans sa singularité.

Ce que nous voyons, ce que nous craignons à travers tout ceci, c’est comme pour les kinés aujourd’hui, que cela aboutisse à des forfaits par pathologie.
Tant d’actes et pas un de plus pour une aphasie, tant d’actes et pas un de plus pour une dyslexie !

Et, là encore, on peut se demander : où est le sujet ?


Bilan normalisé ou chiffré : première rencontre, subjectivité

Issues des techniques de management, les références à des outils diagnostiques uniques ou privilégiés, s'appuient sur des références apparemment scientifiques. Elles sont mises en place discrètement de façon à être progressivement acceptées et même désirées...
On s'y retrouverait mieux, on pourrait parler un langage commun.

Mais de quel langage s'agit-il ?
D'un pseudo-langage scientifique, technique, chiffré, visant une "efficacité supposée", permettant une mise en commun.
Or, dans le bilan, première rencontre entre le thérapeute et le patient (l'entourage également quand il s'agit d'un enfant),
tout est unique ET subjectif.
Le contexte, le moment dans l'histoire du patient, la forme même du trouble, ou de la plainte, ce qu'en comprend le patient, le chemin qu'il se propose de faire en notre compagnie...
Tout est unique ET subjectif.

Les termes diagnostic comme dyslexie, hyperactivité, etc. peuvent être évoqués, évalués, discutés.

Ils ne sont pas faits pour enfermer le patient dans un label qu'il porterait ensuite, souvent comme un fardeau.

Aujourd'hui, les aménagements scolaires tels que
le maintien en maternelle,
une demande de temps supplémentaire aux examens,
la présence d'une auxiliaire de vie scolaire
ne sont accordés que s'il y a reconnaissance de handicap par la Maison Départementale des Personnes Handicapées.

Les termes diagnostic ne sont pas faits non plus, pour enfermer le thérapeute dans une pratique qui découlerait automatiquement de cette labelisation. Nous défendons une autre approche de la première rencontre et du chemin d'accompagnement du patient.
Un Chemin ouvert, marqué par la subjectivité du patient ET celle du thérapeute.

Une résistance possible est de ne pas se plier aux injonctions de normalisation des bilans.
Un compte-rendu de bilan tente de prendre en compte tous les éléments d'un moment de la plainte et ouvre une perspective, ni totalement prédéfinie, ni immuable...

Nous nous efforçons, dans la forme même de la rédaction des bilans, de résister aux formes imposées que nous ressentons comme enfermantes; nous cherchons à préserver toute l'ouverture possible à un devenir du patient.

Ce que nous aimerions préserver

Notre métier, parce qu'il est au carrefour de nombreuses disciplines - linguistique, psychologie, médecine, pédagogie,... - est riche mais nous le sentons aujourd'hui en danger.

A l'heure de la globalisation et de la transparence:

Nous voulons lutter pour garder la pluralité de nos approches, des courants de pensée, de nos formations et donc de nos pratiques !
C'est par la recherche, la réflexion théorique et clinique, la confrontation entre différentes approches que se développe la connaissance de la psychopathologie du langage et sa prise en charge.
Il est essentiel de préserver la pluralité des pratiques cliniques et des références.

Nous voulons continuer à considérer le langage dans sa dimension d'échange entre humains, de structuration de la pensée et de la personnalité.
Avec pour objectif d'accompagner le sujet dans l'élaboration d'une parole juste, c'est à dire en justesse avec lui même, en relation avec son entourage, et son histoire plutôt qu'une parole droite c'est à dire simplement conforme au code formel.

Nous voulons donc lutter contre une approche normée, déshumanisante du langage qui ferait croire à l'existence d'une orthophonie réparatrice venant, par un entraînement intensif des structures lexicales, syntaxiques...., combler les manques du sujet et nier son histoire.

Votre enfant a un trouble sévère du langage??? 4 séances d'orthophonie par semaine !! ...telles des pilules curatives.

Nous voulons que perdure pour chaque orthophoniste, la possibilité d'adapter sa pratique, d'élaborer ses objectifs, d'envisager ses techniques
avec le TEMPS :
avec le temps pour le patient de formuler sa demande propre et pas celle d'une institution.
avec le temps d'une rémédiation différente pour chaque sujet et non pas pour chaque trouble.
avec le temps pour un enfant de vivre sa propre évolution, sans céder aux pressions d'efficacité scolaire rapide, d' orientation...

Nous voulons lutter aussi pour préserver notre espace à penser, à créer, afin de travailler en liens avec d'autres professionnels si cela s'avère opportun pour le patient et ne contrevient pas au secret professionnel.

Nous ne sommes ni enseignants, ni médecins, ni psychologues...., et nous voulons et devons aujourd’hui clarifier notre pratique afin de la défendre, non en concurrence avec ces autres professionnels, mais en soulignant bien ses spécificités, pour la différencier des autres champs professionnels tout en préservant une éthique de travail.


Marie Algrain, Isabelle Bouquet Piegza, Marie-Claire Buliard, Mathilde Jouhet, Marie Knittel, Dominique Taulelle.

Sauvons les RASED

Gaby Keiser-Weber, Psychologue Education Nationale, je travaille comme psychologue scolaire dans un RASED : Réseau d’Aides Spécialisées aux Elèves en Difficultés … aux cotés de collègues du RASED, les enseignants spécialisés:
- les maîtres E, chargés de l’aide pédagogique : travaillant souvent en décalage par rapport au programme, proposant des accompagnements pédagogiques et des progressions méthodologiques sur les fondamentaux non acquis mais incontournables, pour que l’enfant tente de se raccrocher au programme en cours.
- les maîtres G, chargés l’aide rééducative : se situant à la frontière du scolaire, accompagnant les enfants, en individuel ou en tout petit groupe, par le biais de médiations diverses, autour d’axes comme la socialisation, la frustration, le rapport aux règles, etc... , pour qu’ils puissent retrouver une attitude d’élève.


Les RASED

Le terme générique RASED indique une différentiation fondamentale des fonctions et des spécificités de chacun : les places ne sont pas interchangeables et doivent être clairement identifiées.
Le E de RASED renvoie à Elève alors que j’aurais spontanément toujours tendance à dire Enfant... l’éducation nationale oublie trop souvent l’enfant, sans enfant il n’y aurait pas d’élève.

Seuls les professionnels de l’école et travaillant en partenariat avec l’école, connaitraient l'existence des RASED, si à l’automne, dernier le ministère n’avait annoncé la suppression des RASED sur trois ans, avec une première vague de 3000 suppressions de postes ( E et G) pour 2009, soulevant une vive polémique :
- 300 000 signatures convergent vers l’appel « sauvons les RASED »
- soutiens du monde politique, universitaire, psychiatrique, psychanalytique, des parents d’élèves et même du syndicat des inspecteurs.

Pourquoi la suppression : différents contextes qui s’emboîtent les uns les autres

- Contexte économique : 11 000 enseignants partant à la retraite ne seront pas remplacés par de nouvelles embauches, il faut donc trouver en interne… c’est moins visible de ponctionner des enseignants dans les RASED plutôt que de fermer des postes « devant classe », les RASED sont un vivier de personnels qui ne sont pas « devant classe ».

- Contexte évaluatif : la France est pointée comme mauvais élève dans les enquêtes européennes, le ministère justifie que les RASED n’ont donc pas fait leur preuve pour faire remonter le niveau des élèves, du moins ces résultats seront repris comme « leitmotiv » ou comme « causalité », justifiant les orientations en matière de politique éducative par le ministère .

- Contexte de réforme de la politique éducative : la suppression des RASED s’inscrit dans le prolongement de la suppression des samedis matins, de la mise en place des stages de remise à niveau proposés pendant les vacances pour les cours moyens, de la mise en place des aides personnalisées du soir pour les élèves en difficultés, dès la petite section maternelle .

L'aide personnalisée ne peut remplacer les RASED

L'aide personnalisée est une offre gratuite ouverte contradictoirement aux officines privées en tout genre vendant du rattrapage scolaire.

Tout enseignant a l’obligation de dispenser et d’encadrer ces aides personnalisées. Sans mettre en débat le rythme de l’enfant ou la stigmatisation éventuelle, des apports positifs des aides personnalisées sont constatés, quelques effets transférentiels aidant, certains enseignants ont découvert leurs élèves sous une autre facette, et c’est tant mieux !

Cependant, nombreux sont les enseignants qui nous disent être démunis face à la grande difficulté scolaire qu’ils ne savent et ne peuvent pas prendre en charge, mais qu’ils ont l’obligation de faire, du moins de tenter de faire.

Impact de l’appel « sauvons les RASED » : qu’en est-il aujourd’hui ?

Ces derniers mois ont vu fleurir des effets d’annonce, de rectificatifs, des annulations, des changements de cap… au jour d’aujourd’hui les RASED survivent, il n’est plus question de suppression des RASED, l’hémorragie est stoppée pour un temps…. mais les RASED seront largement amputés dans leurs effectifs.

Au niveau national, sur les 3000 suppressions de maîtres spécialisés E et G annoncées, seuls 1500 postes seront effectivement pérennisés. 1500 autres postes se verront sédentarisés, affectés à une classe ordinaire ou affectés en surnuméraire dans une école. De fait leur spécialisation se trouvera totalement annulée et impraticable.

Contrairement aux effets d’annonces, sur le terrain, la pérennité des RASED est menacée.

Des collègues perdent leurs postes, certains en formation n’en trouveront pas à la rentrée. Les RASED déjà incomplets peinaient à effectuer leurs missions mais amputés de nombre de postes à la rentrée que restera-t-il et qu’en sera-t-il des RASED ???

Qu’en est-il des psychologues scolaires ?

Ils ne sont pas comptabilisés dans les 3000 suppressions de postes, et échappent à cette logique. Ils ne sont cependant pas épargnés, la menace est autre… liée à plusieurs contextes :

- 1er contexte, c’est l’absence de statut : statutairement enseignants spécialisés, nous avons une dérogation de fonction conforme au décret de 1985 pour les psychologues, liée à notre DEPS ( diplôme d’état de psychologue scolaire). Nombreux sont les collègues qui ont contourné cette forme dérogatoire et ont poussé leur formation au niveau DESS ou master 2, ou par des formations personnelles continues. Cependant à l’issue de la mastérisation des enseignants, le DEPS sera de fait, caduc. Les projets en cours sont des plus alarmant. A l’instar des maîtres E et G, à quand le maître « P » issu d’un master d’enseignement option psychologie ? Formé, formaté pourrait-on presque dire, comme technicien du bilan psychologique où la psychologie se résumerait à quelques heures optionnelles ?

- 2ième contexte, c'est celui de la médicalisation des difficultés d’apprentissages et la création des MDPH : nos missions ayant tendance à se recentrer sur l’expertise [« Expertise » oh combien je n’aime pas ce mot, trop désubjectivant ! En tout cas ce n’est pas dans ce signifiant que je situe ma fonction]. Cette expertise est attendue en particulier pour la constitution des dossiers MDPH (maison départementale des personnes handicapées) et l’accompagnement de ces enfants, « les handicaps » ne cessant par ailleurs de se démultiplier.

La fonction de psychologue pourrait en devenir de plus en plus réduite. Je suis convaincue de la nécessité de la prise en compte de la dimension subjective et intersubjective dans le champ de l’école. En tant que psychologue scolaire, parce que cela identifie mon lieu d’exercice, je continuerai à défendre cette position tant que cela sera possible pour moi. Notre fonction de psychologue à l’école, ne peut, et ne doit pas, se réduire à celle d’expertise !

La suppression des RASED s’inscrit dans les orientations actuelles de la prise en charge des enfants en difficultés scolaires

C'est une logique binaire du tout pédagogique versus handicap : plus de place pour le « retard ordinaire » et/ou la dynamique psychique en jeu, pas de tiers possible.

- Les RASED constituent ce « poumon » nécessaire au fonctionnement de l’école, cela implique une respiration et donc une temporalité autre de l’accompagnement de l’enfant en difficulté à l’école.

- C’est un lieu d’une autre prise en compte de l’enfant en difficulté à l’école.

- C'est une instance reconnue des partenaires de l’école (médico-psychologique, judicaire, sociaux, éducatif…).

Il me parait tout à fait nécessaire de garder et d’étoffer la pluridisciplinarité des offres de prise en charge que proposent les RASED et qui de surcroît se distinguent des offres de soins, ou qui peuvent venir en complément.

Ouverture sur la résistance des RASED

Les personnels des RASED luttent au quotidien pour :

- Eviter le fichage nominatif de toutes données concernant les enfants qui seraient transmises hors de l’école dans les diverses évaluations nationales globalisantes CE1, CM2…

- Eviter le fichage nominatif lors des bilans d’activité exigés pour les RASED : Il n’est pas toujours évident (voire impossible) dans certains secteurs du département de pouvoir déroger à l’ordre injonctif hiérarchique…

- S’opposer à la transmission de données confidentielles à l’intérieur de l’institution, notamment concernant les suivis thérapeutiques, ils sont vigilants afin que ces informations « ne suivent pas l’enfant ». Et là, c’est vraiment une lutte au quotidien dans la multiplication des contractualisations diverses internes à l’école (aides personnalisées, stage de remise à niveau, projet personnalisé de réussite éducative Projet personnel de scolarisation…) et externes à l’école dans la multiplication des accompagnements divers proposés aux enfants.

- Tenter de rester maîtres des indications de prise en charge RASED, alors qu’en certains endroits les décisions sont prises hiérarchiquement, dans leurs indications, dans leur durée ou arrêts, indépendamment des analyses que pourraient être réalisées par les professionnels concernés.

- Lutter contre la médicalisation de plus en plus systématisée des difficultés d’apprentissages, et le glissement sans précédant vers le handicapisation des difficultés d’apprentissages.

Pour conclure, ou pour ouvrir ?

La spécificité de chacun, évoquée au début de mes propos, se trouve fortement compromise, voire diluées ou interchangeables.

Les missions des enseignants spécialisés E et G se verront soumises aux aléas décisionnels divers et selon la configuration de ce qu’il restera comme personnel dans un R.A.S.E.D et des impulsions hiérarchiques locales.

Un recentrage, est attendu et exigé, sur le « pur pédagogique de la classe dans le prolongement du programme», considéré comme le seul garant de la réussite scolaire.

Alors que l’on pourrait souhaiter un déploiement nécessaire des RASED, la simple question de la pérennisation me paraît aujourd’hui bien incertaine.
D’où ma présence à cette table ronde qui s’inscrit dans la convergence de l’appel des appels afin que les RASED, vous permettrez encore une fois de trébucher sur quelques lettres de ce sigle, afin que les RASED ne deviennent pas des Réseau d’Aide Spécialisés En voie de Disparition !

Nos enfants sont (encore) fichés,
On ne s'en fiche (toujours) pas

Pétition publiée par le Collectif National de Résistance à la Base Elève.

... Lire et signer la pétition

Défendons notre modèle Républicain:
inscrivons une Charte des Services Publics
dans la Constitution

Pétition initiée par la députe Michel Vauzelle.

... Lire et signer la pétition

Nous les prenons ET NOUS LES GARDONS
sous notre protection

Pétition publiée par le Réseau Education Sans Frontières.

... Lire et signer la pétition

De l'extension sociale de la norme
à la servitude volontaire

Intervention de Roland Gori à la journée nationale de l'Appel des Appels du 22 mars 2009 :

« L’époque qui ose se dire la plus révoltée n’offre à choisir que des conformismes. La vraie passion du XXe siècle, c’est la servitude. »
Albert Camus, L’Homme révolté, p. 293.

Je voudrais aujourd’hui rapidement évoquer trois idées :

- La première : si pour moi la question de la désobéissance civile se pose moins que celle de la servitude volontaire, c’est bien parce que nous sommes aujourd’hui davantage dans une société articulée à la norme plutôt que dans une société articulée à la Loi ou du moins à une Loi fondée par un véritable système juridico-politique. Cette extension sociale de la norme requiert le consentement des sujets, leur servitude volontaire et leur intériorisation des normes.
- La deuxième idée, c’est que l’évaluation telle qu’elle se pratique aujourd’hui est une véritable dévaluation. Elle est la matrice de cette servitude volontaire qui au nom de la religion de la science, de la rationalité technique et de la logique comptable produit une soumission sociale librement consentie.
- Troisième idée : pour résister à ces dispositifs de servitude que constituent les normalisations des pratiques professionnelles et sociales, il faut toujours davantage s’engager dans une culture des métiers, de leur éthique et de leur finalité spécifique. C’est au nom de cette culture professionnelle et de la communauté qui l’incarne que nous pourrions risquer une position collective d’objecteurs de conscience face à cette politique de civilisation qu’est l’évaluation.

Laissez-les grandir ici!
Deux ans déjà!!

Pétition publiée par le Réseau Education Sans Frontières.

... Lire et signer la pétition

Charte de l’Appel des Appels

Nous, professionnels du soin, du travail social, de la justice, de l’éducation, de la recherche, de l’information, de la culture et de tous les secteurs dédiés au bien public, avons décidé de nous constituer en collectif national pour résister à la destruction volontaire et systématique de tout ce qui tisse le lien social...

... Lire la suite de la charte

SOS Services Sociaux en Danger

Pétition publiée par le Mouvement Pour une Parole Politique des Professionnels (MP4), collectif de professionnels du champ social.

... Lire et signer la pétition

Comment vivre ensemble aujourd’hui
dans une culture du court terme ?

Intervention de Roland Gori à la journée nationale de l'Appel des Appels du 31 janvier 2009 :

Au moment où notre civilisation manifeste de la haine et du mépris à l’égard de la pensée, du travail de la culture, du temps nécessaire pour comprendre nous voulons remonter le courant de cette civilisation qui nous entraîne vers les chutes de l’humain.

Nous assistons aujourd’hui à une véritable éclosion de pétitions et d’appels en tous genres qui témoignent de signes de colères et de chagrins, de symptômes de souffrances sociales, de ce grand corps social malade.

Comment ne pas y voir aujourd’hui les signes multiples et en même temps convergents d’une maladie qu’il convient de diagnostiquer et de traiter au-delà de ses symptômes ?

Donc il s’agit maintenant de passer du traitement des symptômes au diagnostic et au traitement de cette maladie de la civilisation qui se manifeste en différents lieux de souffrance du corps social. Le temps des pétitions et des appels est dépassé, le temps des réactions révolu. Il convient maintenant d’établir un véritable cahier des charges, un véritable cahier à charges de ce qui ne va pas aujourd’hui dans cette nouvelle politique de civilisation.

Annulation de l'accord Vatican - Kouchner

Pétition publiée par le Collectif pour la promotion de la Laïcité.

... Lire et signer la pétition

Jeunesse sans papiers , jeunesse volée,
la loi doit changer

Pétition publiée par le Réseau Education Sans Frontières.

... Lire et signer la pétition

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